11/11/2009 - L'Européen, Paris, France

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11/11/2009 - L'Européen, Paris, France
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Setlist :

World of liars / All you wanted / All his stupid friends / Sunset hotel / Great fool / On every corner / Knowing you were loved / Things you keep / The goodbye train / Mr. Somewhere / A life full of farewells / Not every clown can be in the circus / Everything is given to be taken away / Thank you for making me beg / Paint the days white / 21

(de mémoire et dans le désordre)

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Played l'Européen five years ago on November 11th 2009, with M le Poisson, Eliot Fish. It was a public holiday, it was Remembrance Day. The show had sold out, which seemed a fine welcome to Paris. We opened the set with this song, “It's Not Our World Anymore” and then the remembrances flowed from there. At drinks and a midnight dinner after the show, put on by the affable promoter, he said as if I might be able to explain it “So. 350 Parisians here tonight...and no Australians.” I said that sounded about right. He then told me about a promoter friend of his who had once put on another Australian act. “300 Australians—and no Parisians.” It had been a bad year, but that was how it ended. That was my Remembrance Day.


- Compte-rendu par Jérôme

 

 

"On sera là, à l'attendre, quand il posera de nouveau le pied sur le quai.". C'est sur ces mots que je finissais ma chronique de " Drift" pour Sefronia, sept ans presque jour pour jour avant le concert de l'Européen : avec Peter Walsh, on est dans le monde des paroles données et des promesses tenues. Au centuple.

En lever de rideau, 49 Swimming Pools, le groupe d'Emmanuel Tellier sans lequel cette soirée n'aurait pas pu avoir lieu. Avant le concert, je pensais qu'il y avait un rapport entre le nom du groupe et un film bizarre dans lequel Burt Lancaster passe de piscine en piscine ("The swimmer", 1968). Pas évident, au final. Tellier (piano et chant), Fabien Tessier (batterie, piano, samples) et Etienne Dutin (guitares) font une délicate pop à l'ancienne, soucieuse des textes et des mélodies accrocheuses, avec un fond de mélancolie heureuse qui fait toujours plaisir à entendre - un petit côté suranné, désuet, qui ne manque pas de charme. Que ce soit amitié ou en art, on sent qu'Emmanuel Tellier est fidèle ; on décèle quelques tournures de phrases dérivées de Morrissey (les Smiths, influence marquante de Chelsea, un précédent groupe d'Emmanuel) : "Used to be a sweet boy"... "To die by your side / Is such a cool way to die"... "I've always been the one dressed in black"... (pardon pour les approximations).  Tout à la fête de ce concert, Emmanuel s'est amusé à citer deux fois le nom de Peter Walsh dans les paroles . Il a aussi remercié la  Blogothèque et  Magic! d'avoir "compris l'importance de ce concert, EUX !".

Dire que tout a commencé pour moi par un article du même Tellier dans un numéro mensuel des Inrockuptibles de 1993, pour la sortie de "Drift"... J'avais 17 ans ; cet article m'a bouleversé. A l'époque, un papier bien tourné, écrit avec le coeur et les tripes, ou une diffusion sur une radio locale ou chez Bernard Lenoir, faisaient la différence. Quand j'ai entendu "The goodbye train" chez Lenoir, j'ai levé la tête de mon devoir d'histoire-géo, et j'ai su que c'était pour moi. C'est par-là que je suis devenu "fan" – matricule "Fête foraine" n°77, "Apart" n°40, pour les connaisseurs. Plus tard, quand il a fallu choisir un premier disque à chroniquer sur Sefronia, "Drift" s'est imposé à moi presque naturellement. Depuis l'annonce de la mini-tournée de Peter Walsh, j'ai réalisé via  un post sur la Blogothèque que l'on était suffisamment nombreux à partager la même affection pour ses disques. Ces concerts allaient être pour nous tous une occasion inespérée de payer Walsh en retour de tout ce que l'écoute de ses disques nous a apporté.

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Peter Walsh s'est fait beau. Mince, rasé de frais, cravate et costume, des lunettes de soleil et des cheveux en bataille qui lui donnent un petit air de Bob Dylan - c'est un peu comme si nous étions la reine du bal, accompagnés par un chevalier-servant plus que tout soucieux d'apparaître sous son meilleur jour et de ne pas décevoir. Conscient de l'attente de quelques dizaines de personnes en France, Walsh a donné la rare impression (surtout dans le rock...) d'avoir de l'estime pour son public. Dans une interview récente, il déclarait vouloir beaucoup parler lors des concerts, pour révéler l'histoire des chansons, car personne d'autre que lui ne pourrait s'en charger. Il l'a fait, brièvement, pour "Great Fool" et "The goodbye train". Il a commencé à introduire "Everything is given to be taken away" en disant qu'elle a une longue histoire... et qu'il ferait mieux de la raccourcir... après un temps d'hésitation, il s'est lancé dans la chanson : comme si le temps lui manquait, et qu'il préférait profiter de son passage sur scène pour donner le maximum au public venu l'écouter - après tout, ce "goodbye train", qui l'a déjà avalé et recraché deux fois, pourrait bien l'embarquer pour un troisième tour... quelle immense générosité !

Pour cette tournée de trois dates, Peter Walsh est accompagné d'Elliott Fish (guitare électrique) sur tous les titres, et selon les chansons par Fabien de 49 Swimming Pools (piano), un percussionniste (tambourin) et un trompettiste (je n'ai pas retenu leurs noms). Walsh a ouvert son concert de manière inattendue, avec la relecture de "Wold of liars", une chanson mineure selon moi (et elles sont rarissimes chez lui), un peu perdue sur "Apart" (1997). Il en a livré une version transfigurée, transcendée même, par la puissance et la nervosité de l'interprétation, par l'intention terrible mise dans chaque phrase : tout le concert sera sur la même ligne de tension. Peter Walsh n'a rien perdu de sa voix magnétique, encore plus saisissante en concert : une recherche permanente de l'intonation juste, servie par un son idéalement clair, et des musiciens impeccables. Enchaînement avec "All you wanted", single nerveux de 1985, pas disponible sur les albums en Cd. Parmi toutes les perles de la soirée (voir setlist plus bas), on retiendra le fantastique enchaînement de "The goodbye train", jouée sauvagement, avec le chuchotement de "Mr. Somewhere". Une ovation debout précède le rappel, pour lequel Peter revient seul en scène jouer un titre inédit. Il nous prévient : "This song has never been played before. I hope you will (silence).... Well, I know you will". Tout est dit. L'arpège tourne, nous hypnotise et nous emmène au coeur du monde de Peter Walsh. Le nôtre, assurément.

 

texte original : www.sefronia.com